samedi 27 octobre 2018

Ujana : Les origines de ce fléau



Vers la fin des années 1970, une délégation de dirigeants zaïrois se rend à Paris pour une de ces multiples missions qu’ils ont l’habitude d’effectuer. Un jour, au cours d’un repas auquel j’assiste, ces hommes se mettent à parler de leurs prouesses, non pas amoureuses, mais sexuelles. Sans vergogne, ces autorités se vantent de leurs ébats sexuels et de leurs penchants pour les jeunes filles de moins de seize ans. Pour épater ses collègues, l’un d’entre eux hausse la voix et clame haut et fort qu’il a déjà eu des rapports sexuels avec une enfant de douze ans. Et il ajoute : « qui dit mieux ? » Impressionnés, ses collègues applaudissent et se mettent à rire à gorge déployée émerveillés qu’ils sont par cet exploit. Je suis outrée ! Figurez-vous qu’au moment
où je couche ces lignes, ce monsieur est toujours en activité sur le plan politique et occupe un poste à responsabilité en RD Congo.

Plus tard, au cours des années 1980, naît à Kinshasa une mode dénommée «  fioti fioti ». Ce qui veut dire littéralement les «  petites ». Pour agrémenter leurs concerts, de nombreux musiciens prennent comme danseuses des filles mineures de 16 ans voire moins. Après lesdits concerts, ces musiciens s’adonnent à un libertinage effréné avec ces jeunes filles. Dans la ville, tout le monde en parle mais sans vraiment s’offusquer. Ainsi, dans la suite logique des choses, cette tendance malsaine fait des émules auprès de nombreux hommes responsables, et ce, jusqu’à présent.
A cela s’ajoute le fait que face à la misère grandissante dans notre pays, de nombreux parents ne pouvant plus subvenir aux besoins de leurs progénitures passent une bonne part de leur temps dans des églises dites de réveil. Espérant trouver des solutions miracles face à leur indigence, ces parents ne se rendent pas compte qu’ils se font plutôt dépouiller du peu qu’ils possèdent par des pasteurs véreux qui exigent des dîmes soit disant salvatrices. Pendant ce temps, pour satisfaire leurs besoins primaires, leurs enfants cherchent des solutions dans les rues en s’adonnant à toutes sortes de vices.
Concomitamment ou presque, une autre mode s’est installée auprès des étudiantes  à l’université. Baptisée « chic, chèque, choc », cette démarche consistait à offrir ses
charmes à un homme financièrement confortable (le chèque). Ensuite, dépenser ces coquettes sommes dont elles étaient gratifiées avec leur amant (le choc), tout en recherchant le grand amour auprès d’un jeune étudiant  (le chic). Les plus jeunes singeant inévitablement leurs aînées, ce système s’est naturellement répercuté chez les jeunes filles de 14 à 16 ans dans les quartiers défavorisés de nos villes.

Au vu de tout ce qui précède, la suite était inéluctable. En effet, c’est ainsi que le phénomène Ujana a progressivement vu le jour. Mais de quoi s’agit-il exactement ? En swahili, ujana veut dire, jeune. Désormais, ce terme est utilisé pour désigner des jeunes filles de 14 à 18 ans aguicheuses. Très légèrement vêtues, celles-ci ne portent pas de soutiens gorges et souvent pas de slips non plus. Leurs habits très légers laissent deviner leur anatomie. Elles se déambulent dans les rues pour appâter les hommes qui se prêtent volontiers à ce jeu. Le tarif d’une gâterie pouvant aller de 5 à 20$.
Depuis peu, les autorités tentent enfin de prendre en compte la problématique Ujana. Elles essayent d’éradiquer ce fléau, sauf qu’à mon avis, elles s’y prennent très mal. Les jeunes filles sont traquées, arrêtées dans les quartiers par les forces de l’ordre et déférées devant la justice. Pourtant, les hommes qui s’adonnent à cette vie de débauche avec ces Ujana, ne sont pas inquiétés et les parents ne sont pas non plus interpellés par la justice.
Le phénomène Ujana est un problème de société que les autorités de notre pays, la RD Congo, ont eu le temps de voir s’installer et elles n’ont pas réagi. Pire, la majorité d’entre elles étaient et sont encore actrices de cette dépravation des mœurs. Ce n’est pas en inquiétant les jeunes filles qu’elles vont éradiquer ce fléau. Il faut aller plus en profondeur. La solution est politique et passe forcément par une bonne gouvernance du social, c’est-à-dire, une bonne gestion du quotidien du congolais.

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