dimanche 25 décembre 2016

La parité homme-femme piétinée pour la énième fois en RDC !


Angèle Makombo: Présidente de la LIDEC
Angèle Makombo, leader du parti politique, la Ligue des Démocrates Congolais (LIDEC), déplore la sous-représentation des femmes dans le Gouvernement pléthorique de Samy Badibanga, soulignant qu'au lieu de progresser sur la question importante de la parité homme-femme, la RDC régresse. Elle estime que les dirigeants congolais refusent délibérément de s'engager en faveur de la promotion de la femme, et égratigne, au passage, Vital Kamerhe pour n'avoir pas soutenu les femmes jusqu'au bout. 8 femmes sur 67 ministres, soit 12% : au lieu de progresser sur « le chantier important de la parité homme-femme », la RDC régresse. Voici l’analyse d’Angèle Makombo sur ce sujet :
Au cours d'une conversation que j'ai eue récemment avec un journaliste congolais respectable appartenant à un média privé connu en RDC, il m'a dit sans ambages : « Malheureusement, il y a très peu de femmes intelligentes dans notre pays » ! Serait-ce aussi le point de vue du Président Joseph Kabila, du nouveau Premier Ministre Samy Badibanga ou de Vital Kamerhe, Président national de l'UNC et Co-Modérateur du Dialogue 1? Sinon, comment expliquer la sous-représentation criante et scandaleuse de la femme congolaise dans ce gouvernement éléphantesque de 67 membres : 8 femmes ministres et vice-ministres, soit à peine 12% ?
Nous sommes loin des fameux 30%, loin de l'Article 14 de notre Constitution relatif à la parité, 
Rwanda:" le bon élève de la parité"
loin de la Résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU sur la femme, la paix et la sécurité, et surtout très loin du discours prometteur du Président Kabila sur l'état de la nation devant le Congrès le 15 décembre 2014. Il déclarait notamment: « Concernant le chantier important de la parité homme-femme, et de la place de celle-ci dans nos institutions, notre performance demeure insatisfaisante. Aucune raison, aucun prétexte ne peut le justifier. La femme congolaise, majoritaire dans notre société, mérite plus et mieux. Victime de l'injustice pendant longtemps, elle a droit à bénéficier de mesures correctives. Dans cette optique, le Parlement, le Gouvernement et les partis politiques sont invités à prendre, chacun à son niveau, toutes les dispositions qui s'imposent pour que nous puissions arriver à une représentation plus équitable des femmes. »

Rwanda: Élues locales, exemple à suivre
Nous demeurons dans une représentation INEQUITABLE des femmes. Au lieu de progresser sur « le chantier important de la parité homme-femme », nous régressons. Le Gouvernement Matata II comptait 48 membres dont 7 femmes (3 ministres, 4 vice-ministres), soit environ 15% de femmes, mais aucune femme avec un ministère régalien; le Gouvernement Badibanga qui, avec ses 67 membres, bat le record en RDC en matière de taille du gouvernement, ne compte que 12% de femmes, toujours aucune avec un ministère régalien. Cette sous-représentation féminine place notre pays parmi les derniers de la classe en matière de parité homme-femme dans notre sous-région de l'Afrique centrale. Le Rwanda par exemple, est depuis de longues années un champion en la matière ; un autre exemple, le Gabon, qui pourtant traverse aussi une crise politique, mais a décidé de rejoindre le peloton des gouvernements « genrés » avec 30% de femmes dans son gouvernement actuel, soit 12 femmes sur 40 ministres. Est-ce à dire que les femmes rwandaises ou gabonaises sont plus « intelligentes » que les femmes congolaises ? Non, sûrement pas, c'est plutôt les dirigeants rwandais ou gabonais qui font preuve de volonté politique et de volontarisme en décidant résolument de favoriser, envers et contre tout, l'émergence des femmes.
Les 67 membres du nouveau Gouvernement accepteraient-ils une réduction de leurs frais d'installation et émoluments, dans un élan de solidarité nationale?
S'agissant du record inquiétant du Gouvernement Badibanga en matière d'effectif avec ses 
Président Ali Bongo Odimba
Photo Overblog
67 membres, d'aucuns sont préoccupés par les conséquences budgétivores que l'exécutif aura sur un budget national déjà amoindri. Car c'est autant de fonds alloués aux frais d'installation et émoluments des nouveaux ministres qui ne pourront pas être consacrés à l'amélioration du social des populations. Or le social constitue l'une priorités du programme du nouveau gouvernement. Peut-on alors imaginer de demander à nos ministres d'accepter, dans un élan de solidarité nationale, de voir leurs frais d'installation, émoluments et autres, réduits d'un certain pourcentage ? Il y a eu des précédents ailleurs, au Nigeria ou en France par exemple. Ce serait un signal social fort.

Les femmes congolaises et Vital Kamerhe
Pour en revenir à Vital Kamerhe, cité plus haut, les femmes se souviendront que bien qu'il ait plaidé auprès du Facilitateur Edem Kodjo, pour une meilleure représentation des femmes au Dialogue politique1, il n'a inclus, aux discussions directes de la Conférence épiscopale congolaise (CENCO), aucune femme de l'opposition parmi les délégués signataires de l'Accord politique du 18 octobre. En outre, aucune femme de son parti n'est ministre dans le nouveau gouvernement ; mais plusieurs hommes membres de l'UNC ou proches de Vital Kamerhe le sont. La dizaine de femmes de la composante opposition à la Cité de l'Union africaine ont contribué à crédibiliser la co-modération de Vital Kamerhe, mais en échange, elles ont été roulées dans la farine !
Refus délibéré de nos dirigeants de s'engager résolument en faveur de la promotion de la femme
J'étais loin de m'imaginer que deux ans après mon article intitulé « Parité malmenée en RDC - Femmes: grandes perdantes du Gouvernement de cohésion nationale » paru dans le quotidien kinois La Prospérité du 9 décembre 2014, suite à la formation du Gouvernement Matata II, je me retrouverai à écrire sur le même sujet aujourd'hui. En fait, j'aurais juste pu faire un copier-coller ! Faire aussi un copier-coller de mon interview avec le magazine panafricain Les Afriques, publiée le15 décembre 2014 et intitulée « Un gouvernement pléthorique faisant fi de la parité ».
Je cherche à comprendre les raisons du refus délibéré de nos dirigeants de s'engager résolument en faveur de la promotion de la femme. Pour justifier l'immobilisme des autorités congolaises à nommer des femmes capables à des postes de prise de décision, la gente masculine congolaise invoque souvent l'absence de « méritocratie » des femmes congolaises, comme si seuls les hommes faisaient partie de cette méritocratie. A ce propos, j'aime citer l'Ambassadeure du Canada en RDC, Mme Ginette Martin, qui avait déclaré : « les femmes capables ne manquent pas en RDC, ce sont des hommes capables de les écouter qui font défaut ». Et puis, on nous avait promis des personnes compétentes, rigoureuses et intègres au sein du nouveau gouvernement. Hélas, ce n'est pas le cas pour certains ministres !
J'ai décelé d'autres raisons invoquées pour justifier la sous-représentation des femmes dans 
"Égalité homme/femme
Photo Politika
le gouvernement dans un article de Zabulon Kafubu, intitulé « Gouvernement Badibanga : les femmes sous-représentées et figurantes. 8 sur 67 ministres au lieu de 20 », et posté le 20 décembre dernier sur le site 7sur7.cd. Dans sa conclusion, Kafubu souligne : « Aucune femme Vice-premier ministre ni ministre d'État. Pas de femme non plus aux ministères régaliens et stratégiques. Le premier ministre Samy Badibanga n'est pas à blâmer. Ce sont les femmes qui sont à plaindre. Elles doivent s'engager davantage dans la politique afin de peser sur les décisions. De toutes les femmes nommées au gouvernement, il n'y a pas de poids lourds politiques. Réalisme politique oblige, elles se contenteront des miettes. C'est par leur mérite qu'elles s'imposeront et non à cause de leur féminité. Vive la parité! »

Réagissant à l'article de Kafubu, un internaute a traité les femmes politiques de « femme canapé » ; d'autres ont reproché aux femmes leur manque de compétitivité, de stratégie, de dynamisme, de mobilisation sur le terrain. Un autre encore a fait valoir que « La parité homme-femme n'est pas un cadeau pour les femmes. C'est un pari à gagner pour elles et par elles. »
Un Congo plus beau qu'avant « n'arrivera que lorsque, entre autres, les femmes seront pleinement représentées à tous les niveaux »
Oui la parité n'est pas un cadeau. Oui les femmes congolaises doivent s'engager plus en politique, c'est d'ailleurs mon credo en tant que Présidente nationale du parti politique de l'opposition, la Ligue des Démocrates Congolais (LIDEC). Et s'engager plus en politique signifie prendre le temps de s'informer et se former, se documenter, s'impliquer à la base, appréhender les préoccupations des populations, faire des analyses sur les enjeux de l'heure, prendre position sur ces enjeux et oser prendre la parole publiquement pour dire sa position. Mais il appartient aussi aux dirigeants de notre pays d'être respectueux de leurs engagements nationaux et internationaux visant à réduire les inégalités entre les hommes et les femmes et d'avoir réellement une vision audacieuse d'un Congo plus beau qu'avant qui « n'arrivera que lorsque, entre autres, les femmes seront pleinement représentées à tous les niveaux ».
Angèle MAKOMBO
Présidente Nationale de la Ligue des Démocrates Congolais (LIDEC)




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