Les routes de la RDC profonde |
Coucou, mes
chers lecteurs et lectrices, me revoici parmi vous! Raison de mon absence ? J’étais très
prise dans l’organisation des dépôts des candidatures des membres de mon parti
politique, la Ligue des Démocrates Congolais (LIDEC) pour les élections des députés
provinciaux prévues en octobre prochain en RDC. Je suis moi-même candidate à Lemba, l’une des
24 communes de la Ville-Province de Kinshasa.
Les députés provinciaux (législateurs au niveau des 26 provinces du
pays), une fois élus au suffrage universel direct, formeront l’assemblée provinciale dans chacune de leur province respective. Chaque assemblée provinciale élira à son tour
en janvier 2016, les sénateurs au niveau national,
ainsi que les gouverneurs et
vice-gouverneurs de province. Le Secrétaire Général de la LIDEC circulant dans sa circonscription |
Le secrétaire Général de la LIDEC sur une moto en direction de Dimbelenge |
Les cadres de la LIDEC de Dimbelenge |
Le processus des
dépôts des candidatures était fastidieux et coûteux ! Beaucoup de
paperasses pour rien, à mon point de vue. Le candidat et ses deux
suppléants avaient une trentaine de formulaires à remplir ! Plusieurs pièces
à fournir dont l’attestation de naissance (coût : 10 dollars) à retirer
dans la maison communale, où il fallait parfois faire preuve de beaucoup de
patience face à des agents submergés de travail ou simplement de mauvaise
humeur…Faire la queue à la banque pour payer la caution de 500 000FC (environ
540 dollars) par liste de candidats. Certains documents devaient être remplis
au stylo noir, alors que d’autres au stylo bleu… Sans oublier les photocopies
certifiées conformes de certaines pièces.
Je vous laisse imaginer combien de fois il a fallu venir au secours de
l’un ou l’autre candidat pour l’assister dans ce processus laborieux.
Constat amer : la moralité et la maturité en politique font
cruellement défaut en RD Congo
Imaginez :
vous prenez la peine d’aider financièrement et sur le plan logistique un candidat
(membre de longue date de votre parti), à constituer son dossier pour sa
candidature aux élections provinciales.
Celui-ci, une fois son dossier complet, va proposer sa candidature à un
autre parti politique, en manque de candidats et/ou de suppléants, moyennant
une poignée de dollars ! Prêt à se
faire acheter pour $100, $200, ou un petit peu plus, peu importe que l’offre de
débauchage provienne de la majorité ou de l’opposition, c’est blanc bonnet,
bonnet blanc ! Aucun scrupule, aucun respect de la parole donnée, aucun
amour-propre, aucun sens de l’engagement politique et de la redevabilité,
aucune moralité, les élections étant considérées par certains comme l’occasion ou jamais de
se faire un peu d’argent. De nombreux partis
politiques, surtout certains soi-disant « grands partis » ont eu recours à ces pratiques immorales et
condamnables pour combler leur retard dans la sélection de candidats, de suppléants
et dans la constitution des dossiers
Odon Charles Tshibola devant le bureau de la CENI de Dimbelenge |
.D’autres
candidats, de surcroît têtes de liste dans certaines circonscriptions, n’ont
pas hésité à détourner les fonds que le parti leur avait transférés depuis
Kinshasa pour le payement de la caution de dépôt de candidatures à la banque, renonçant
ainsi à être candidats pour pouvoir empocher 600 dollars ou 1200
dollars ! Dans leur renoncement, ces candidats sans foi ni loi, ont
entraîné l' élimination d’autres candidats inscrits sur leur liste.
A cet égard, nous avons constaté que ces comportements répréhensibles ne
sont pas l’apanage des hommes uniquement, même des femmes se sont livrées à de
telles pratiques. Ce n’est pas tout, de l’argent envoyé à des cadres
influents de certains partis politiques pour payer la caution, a été utilisé à leur propre profit ou à d’autres fins
Ce qui était
également choquant, c’est de voir certains candidats qui ne sont pourtant pas démunis , attendre que leur parti politique fasse absolument tout pour
eux : payer la moindre photocopie, le moindre document ou le moindre déplacement.
Voilà, ce que la cupidité d’un individu peut faire comme dégâts
Autre déboire :
un avocat, pourtant censé ne pas ignorer la loi, qui se porte candidat dans
deux partis politiques différents, au même moment, dans la même circonscription. Dans un parti, il est candidat, dans l’autre,
il est suppléant. Comment est- ce possible ? Il a tout simplement trompé le second parti
qui était en manque de suppléant pour monnayer sa candidature et avoir un peu
d’argent. En agissant ainsi, tout homme
de loi qu’il est, il met en difficulté les deux partis politiques car lorsque
la Commission Électorale Indépendante (CENI), allait se rendre compte du
subterfuge lors du toilettage des dossiers, elle allait annuler les listes des
deux partis. Voilà, ce que la cupidité d’un individu peut faire comme dégâts.
Pour rappel,
une circonscription pour les élections provinciales peut contenir un ou
plusieurs sièges (de 1 à 7, voire même 8 sièges); chaque candidat doit avoir
deux suppléants ; une liste revient
à $540.
Une anecdote étonnante
Et que dire de
l’état des routes pour accéder aux circonscriptions électorales sur toute
l’étendue de la République. Par exemple pour
atteindre la circonscription de Dimbelenge, dans la province du Kasaï
Central, depuis Kananga, le chef lieu de cette province, il faut faire 123km
sur une route en très mauvais état. Comme
il n’y a pas de transport public, il est préférable sur ce genre de routes de
prendre la moto pendant 3 à 4 heures; comme vous pouvez l’imaginer, c’est très
épuisant. La jeep, c’est dangereux et le prix est
exorbitant, hors de la portée de la plupart des gens.
Pour conclure,
je voudrais vous raconter une anecdote
assez intéressante: un cadre d’un parti politique, pourtant bien nanti de la
majorité, s’est retrouvé, aussi étrange que cela puisse paraitre, dans
l’impossibilité de se rendre à Dimbelenge vu l’état déplorable de la route et le manque de
moyens financiers. Il a demandé secours à
un cadre d’un parti de l’opposition qui se rendait à Dimbelenge, pour faire
parvenir à bon port les dossiers de ses candidats. Ce dernier, en bon samaritain, a accepté. Le parti de l’opposition dont il s’agit, n’est
autre que mon parti politique, la Ligue des démocrates congolais (LIDEC). Ce fut la croix et la bannière pour notre
Secrétaire Général d’atteindre sa circonscription de Dimbelenge sur une moto roulant sur une route chaotique. Panne,
crevaison, marche à pied forcée etc., et pour finir, le chauffeur et lui ont dû
dormir, au bord de la route, à la belle étoile.
Autre décors : cette fois dans la province de Bandundu entre
Kinshasa et Kikwit, le Président Interfédéral de notre parti pour cette
province, a failli perdre la vie lorsque sa jeep a fait plusieurs tonneaux sur
la nationale 1. Voilà les divers désagréments et les dangers que de nombreux
candidats ont connus lors des dépôts des candidatures pour les élections
provinciales.
La RD Congo,
n’est pas à sa première organisation d’élections. Je crois donc, qu’il est plus que temps pour les
autorités compétentes d’avoir le souci d’améliorer la situation et les
conditions pour que les candidats puissent se rendre en toute sécurité dans
leurs circonscriptions respectives pour le dépôt de leurs candidatures.
Quant aux
partis politiques, il est également plus que temps de s’organiser, de concert
avec les gouvernants et la société
civile, pour établir et mettre en œuvre des mécanismes efficaces en vue de promouvoir
l’éducation civique et politique de nos populations.
Le processus des dépôts des candidatures pour les élections provinciales en RDC prévues en octobre prochain, a effectivement révélé une absence choquante d’éthique, de moralité et de maturité politiques dans notre pays. Qu’il est encore long le chemin à parcourir pour y instaurer une véritable démocratie !
RépondreSupprimerJ'attendais cet article avec impatience, et il ne m'a pas déçu
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